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« L’Échange » de Eugenia Almeida

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Le suicidé. Edouard Manet. Vers 1877   Titre original : La tensión del umbral Traduit par François Gaudry (Éditions Métailié, 2016) Eugenia Almeida, née en Argentine en 1972, est chroniqueuse, romancière et poétesse. Elle offre avec ce récit, d'un style concis et avec une fin ouverte, un roman noir : à la sortie d'un bar, une jeune femme menace un inconnu puis retourne son revolver contre elle-même et se suicide. Pas de quoi faire une enquête. Pourtant le journaliste Guyot veut savoir ce qui s'est passé et il s'entête à chercher sans mesurer le danger. « Guyot se dirige vers la porte. Quand il passe près des gens, le long des manteaux, des vestes, des chaussures, quelqu'un se tourne et le met face à ce qu'il ne voulait pas voir. Le trou, parfait, sur la poitrine, un doigt posé encore sur l'arme, les yeux intacts, immenses, la paume de la main gauche à plat dans une position étrange. Quelques mètres plus loin, les taches successives repro

« Côté cour » de Leandro Ávalos Blacha

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Fluídica Urbana 2, collage de Jorge Rigamonti - 1967   Titre original : Medianera Traduit par Hélène Serrano (Asphalte éditions, 2013) Un univers dystopique où des particuliers sont payés pour garder des prisonniers, où les petites filles sont chauves, où une poupée revient à la vie, où l'on voit des métamorphoses inexpliquées... Dans ce recueil de récits, l'Argentin Leandro Ávalos Blacha, nous surprend par sa poésie violente. « Magda vivait avec son mari, lequel était mort aux yeux de la justice. Elle touchait ainsi une pension de veuve qu'elle complétait en prenant des locataires, de préférence des prisonniers. Dernièrement, on lui avait livré deux frères qui étaient condamnés à dix ans de prison pour enlèvement. Ils avaient à peine vingt ans. Magda leur accordait beaucoup d'attention. Son mari aussi. Elmer ne quittait pas le sous-sol et passait une bonne partie de ses journées à entraîner les prisonniers. Leurs cellules étaient équipées de tapis de sol, d&#

« Le rêveur de l'Atacama » de Roberto Ampuero

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Nuages d'Atacama. 2016, Alessandro Caproni. Titre original : El Alemán de Atacama Traduit par Bernard Cucchi (Éditions 10/18, 2004) Un roman noir de la série d'enquêtes qui a pour héros le détective cubain Cayetano Brulé installé au Chili. Une enquête qui se déroule au nord du Chili, dans le désert d'Atacama où un Allemand travaillant pour une ONG a été tué. Entre pilleurs de tombes, Indiens nationalistes, trafic de drogue, entreprise multinationale aux activités louches, quelle piste devra suivre Cayetano ? Roberto Ampuero, né en 1953, est Chilien. Suite au coup d’État de 1973, il s'est exilé en Allemagne de l'Est, à Cuba et aux États-Unis avant de revenir dans son pays. C'est un des auteurs incontournables du roman noir latino-américain actuel. « Tu n'avais jamais connu la peur, monsieur le député Mariano Pati ño. Jamais. Puis il y eut cette minute maudite. Tu as tressailli. Tu venais de lire dans l'édition dominicale de ton journal que l'All

« Une balle dans le front » de Manuel Aguirre

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  Illustration du  Diable au XIXe siècle de Léo Taxil, Charles Hacks, 1892 Titre original : Una bala en la frente Traduction de Marie Jammot (Les Fondeurs de Briques, 2010) Né à Arequipa, au Pérou, en 1940, Manuel Aguirre fut affecté dans les années 1960 « dans un caserne sur les rives du lac Titicaca, à la frontière bolivienne ». Ce recueil de récits où sont campés quelques personnages de ce lieu et de cette époque – militaires, Indiens, contrebandiers -s'inspire de cette expérience. Des récits plein d'humanité comme des chroniques mêlées de contes populaires effrayants. « Hilario, que beaucoup prenaient pour un démon incarné regarda avec rage la brise glacée s'infiltrer dans sa maison à travers l'interstice de l'entrée principale. D'un saut de félin, il essaya d'empêcher ce mauvais pressentiment de pénétrer, mais il était trop tard. Le vent froid s'était niché au creux de la terre, dans le sol de la pièce. »

« La piel y la máscara" de Jesús Díaz

Jes ús Díaz, nacido en 1941, es un narrador, ensayista, guionista y director de cine cubano. Participó al movimiento revolucionario y fue una figura importante del mundo cultural de la isla hasta que sus escritos críticos ante la revolución lo obligaron al exilio en 1992. Murió en Madrid en 2002. Esta novela publicada en España en 1996 parece inspirada de su propia trayectora cultural en Cuba. Es una novela que narra el proceso de filmación de una pelicula titulada La piel y la máscara. Entonces se superponen dos historias : la de la película y la de la filmación. La película cuenta la vuelta a Cuba de una madre que se marchó a Miami dejando a sus hijos aún adolescentes y que lleva años sin saber de ellos. En cada capítulo de la novela habla uno de los protagonistas de la filmación, poniendo en evidencia las dificultades que padecen en su vida real y las dificultades que eso conlleva para encarnar a sus personajes. Por ejemplo, la actriz principal que hace de papel de madre, en la

"Le silence des eaux" de Rodrigo Rey Rosa

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  Rigoberta Menchu en 2009 Titre original : Que me maten si... Traduit par André Gabastou (Editions Gallimard, 2000) Né en 1958, Rodrigo Rey Rosa est un écrivain guatémaltèque. Après des études au Guatemala, il part vivre à New York, où il étudie le cinéma. Il gagne ensuite le Maroc et participe aux ateliers d'écriture de Paul Bowles à Tanger. Il écrit des nouvelles et des romans qui sont traduits dans de nombreuses langues. Ce roman, même s'il échappe au code classique du genre, est un roman noir qui s'arrête sur les séquelles de la guerre civile qui a déchiré le Guatemala de 1960 à 1996. A travers les destins croisés de trois personnages - Ernesto, un ancien officier militaire, Emilia dont il tombe amoureux et Lucien Leigh, un vieil anglais qui enquête sur les massacres de l'armée – c'est tout le drame du Guatemala rattrapé par son passé qui est dépeint. "Pour lui, Guatemala était synonyme de complications. Il y avait perdu sa première femme. Un ami

"Les rêves qui nous restent" de Boris Quercia

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  Science Fiction Art Robot Narcissist. David S. Soriano,2022 Titre original : Electrocante Traduit par Isabel Siklodi et Gilles Marie (Asphalte éditions, 2021) Né en 1967 à Santiago du Chili, Boris Quercia est acteur, réalisateur, scénariste, producteur et romancier. Créateur de la série policière Santiago Qui ñones , il propose dans Les rêves qui nous restent un roman policier qui est aussi un roman de science-fiction : Natalio, un flic de classe 5, parmi les plus méprisés de la City, doit se procurer un nouvel « électroquant », un nouveau robot d'apparence humaine qui lui servira d'assistant. Acheté d'occasion, ce robot s'avère vite avoir des réactions étranges. Un roman qui invite à une réflexion sur ce qui fait notre humanité et donne une vision angoissante du futur que nous forgeons : existence virtuelle pour oublier, nature incendiée, inégalité sociale... "Mon fonctionnement, limité à celui d'un automate, me permet de ne plus avoir à me soucier