« Le royaume, le soleil et la mort : Trilogie de la frontière » de Yuri Herrera

Les huit espaces du Mictlan decrits sur une feuille du Codex Vaticanus A ou Codex Rios

 

Traduction de Laura Alcoba

(Éditions Gallimard, 2016)


Yuri Herrera est un des auteurs à connaître de la littérature mexicaine d'aujourd'hui. Né en 1970, il est romancier, essayiste, conteur et auteur de littérature jeunesse. Son œuvre romanesque a été saluée du prix Anna-Seghers en 2016.

Cette traduction réunit trois des ses romans qui ont pour cadre la région frontalière avec les États-Unis, une région marquée par l'émigration, le narcotrafic, la guerre des gangs : Les travaux du royaume (Trabajos del reino), Signes qui précéderont la fin du monde (Señales que precederán al fin del mundo) et La transmigration des corps (La transmigración de los cuerpos).

Si Les travaux du royaume évoque la fantaisie médiévale, Signes qui précéderont la fin du monde, qui raconte les mésaventures d'une jeune migrante, Makina, partie pour retrouver son frère, fait appel à la mythologie aztèque. Makina devra traverser les différents niveaux du Mictlan, l'inframonde où vont les défunts, pour se défaire de ce qu'elle était. Dans les deux cas, Yuri Herrera choisit une narration touchant à la féerie pour dire la violence de la réalité.

Le dernier récit, La transmigration des corps, se déroule durant la crise provoquée par la fièvre porcine au Mexique qui a provoqué un état d'exception : Ville déserte, peur collective de la contagion, mesures sanitaires. Dans ce cadre, le mystérieux héros de ce récit, nommé l’Émissaire, négocie une restitution réciproque de morts entre deux familles rivales.


"Je suis morte, se dit Makina lorsque toutes les choses commencèrent à se dérober : un homme était en train de traverser la rue en s'aidant d'une canne, soudain une plainte sèche perça l'asphalte, l'homme s'immobilisa comme attendant qu'on lui répète une question et le sol s'ouvrit alors sous ses pieds; il avala l'homme, et avec lui une voiture et un chien, tout l'oxygène alentour et même les cris des passants. Je suis morte, se dit Makina, et à peine l'avait-elle dit que tout son corps se mit à résister à la sentence et elle battit désespérément des pieds, en arrière, chacun de ses pas à un pied du gouffre, jusqu'à que le précipice devînt visible tel un cercle de perfection, et Makina resta saine et sauve."

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