"Des roses rouge vif" d'Adriana Lisboa
Titre original : Sinfonia em branco
Traduction de Béatrice de Chavagnac
(Editions Métailié, 2009)
Dans une fazenda isolée, au Brésil, s'est déroulé un drame familial que ce roman raconte en restituant le mensonge et le silence qui ont pesé sur les deux petites filles qui en furent victimes : Clarice et Maria Inès. Un récit imagé et profond qui a valu à la Brésilienne Adriana Lisboa le Premier Prix Saramago, réservé à un jeune auteur de langue portugaise.
"Il y avait une loi suprême en vigueur dans cette maison selon laquelle les choses pouvaient exister mais ne pouvaient être dites. On ne touche pas à ça. Et tous les codes superficiels, les apparences, les sourires devaient être maintenus quand bien même, à un autre niveau dangereusement proche, tout était profané.
Otacília prit sa respiration, rééquilibra le timbre de sa voix et dit sur un ton calme, j'ai décidé d'envoyer Clarice à Rio de Janeiro. Pour étudier.
Afonso Olímpio finit de mastiquer le morceau de pain de maïs qu'il avait dans la bouche. Il but une gorgée de café et s'essuya le coin de la bouche avec sa serviette de table. Il ne regardait pas sa femme, il ne la regardait pratiquement jamais dans les yeux. Ils avaient malgré tout des codes similaires. Il toussa d'une toux bien élevée et retenue, en mettant sa main gauche devant sa bouche, tandis que l'autre tenait l'anse de sa tasse restée en l'air. Dehors, les tyrans quiquivi et les merles insouciants continuaient à chanter férocement.
Quel est le motif de cette décision ? Demanda-t-il, calme comme toujours, voix basse, paroles veloutées.
Otacília fit un geste vague des mains et dit c'est pour son avenir. Ici, on ne peut pas étudier. A Rio de Janeiro, elle peut faire des études scientifiques, apprendre le français ou la musique.
Afonso Olímpio, toujours effroyablement petit, enchaîna je ne sais pas si c'est une bonne idée.
J'en ai déjà parlé avec elle, mentit Otacília. J'ai aussi parlé avec ma tante Bérénice qui peut l'héberger, mentit-elle à nouveau.
Tu n'as pas perdu de temps, dit-il "
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